Le chant du canari [ft Jiang Yanli]

Le chef du clan Nie se présente aux portes de Lotus Pier et demande à ce que sa venue soit signalée à Jiang Yanli, la soeur du chef de clan. S’il n’a jamais véritablement été proche d’elle, l’amateur d’art était -et considère qu’il est toujours- ami avec Jiang Wanyin et Wei Wuxian. S’il respecte la femme et qu’il ne souhaite que son bonheur bien que la vie ne semble pas l’épargner, sa visite n’est pas désintéressée. Il se demande si elle a entendu parler de la résurrection du Patriarche Yiling ou si elle a entendu des choses intéressantes sortir des lèvres de son cadet. L’alpha s’inquiète pour son plan et s’impatiente à l’idée de retrouver le corps de son frère mais aussi à l’idée que celui-ci soit vengé.

“Il fait vraiment très beau aujourd’hui” dit-il la partie inférieure du visage cachée par un éventail au motif de cerisier tout en observant l’architecture de Lotus Pier. Huaisang a toujours apprécié la beauté de l’endroit qui se veut raffiné mais sans tomber dans l’extravagance. S'il se sent bien à l'Unclean Realm, il ne peut s'empêcher de s'émerveiller devant la beauté du cadre naturel dans lequel s'est implanté Lotus Pier. Lorsqu'il ferme les yeux, il peut imaginer ses deux amis en train de courir sur les pontons en riant et se disputer pour des sornettes.

L’homme à la longue chevelure d’ébène se demande si le présent qu’il a apporté sera au goût de la jeune femme. Ce n’est rien de bien coûteux et cela n’a pas vraiment de valeur esthétique mais il s’est dit que cela serait plus ou moins adapté. Il lui a apporté un canari qui, il l’espère, saura remonter le moral de Jiang Yanli lorsque celle-ci se sentira seule, triste ou inquiète. Lui-même avait longtemps recherché du réconfort auprès d’animaux lors de moments difficiles, êtres simples et souvent bien moins décevants que les humains.

“J’espère que ma visite ne vous importune pas” annonce-t-il en souriant, baissant son éventail et s'inclinant légèrement, lorsqu’il aperçoit finalement la mère de Jin Ling. “Je vous ai apporté un petit quelque chose, j'espère que ce modeste présent saura vous plaire” ajoute-il en tentant la petite cage contenant le canari à la jeune femme.

Huaisang chantonne alors qu'on le conduit jusqu'au pavillon où il est censé rencontrer Jiang Yanli. Cela fait longtemps qu'il ne l'a pas vue, c'est qu'il a beaucoup été pris dans ses recherches, son "grand plan" et ses devoirs en tant que chef de clan. Il se demande si elle a changé depuis le temps, si sa santé s'est stabilisée et si elle envisage des choses pour le futur. Il se demande également si elle a enfin pu retrouver son mari qui a été crû mort pendant si longtemps.

Sa première pensée lorsqu'il aperçoit la jeune femme, c'est qu'elle est ravissante. Sa beauté et son élégance naturelles ne sont pas sans lui rappeler celles des lotus qui s'épanouissent dans cette région.

-Bonjour Nie Zongzhu… au contraire … vous êtes toujours le bien venu ici. Je suis désolée mais A Cheng n’est pas ici… Il est parti en chasse il y a peu de jours.

Si le cultivateur à l'éventail n'est pas venu avec l'intention de rencontrer le chef du clan Jiang, il est surpris d'entendre qu'il est parti en chasse mais il décide de laisser le sujet sur le côté, pour l'instant.

"Il n'y a pas le moindre souci. A vrai dire, c'est à vous que je souhaitais rendre visite." Le chef du clan Nie marque une courte pause, s'asseyant après en avoir reçu l'invitation de son hôte. "Je me disais que vous deviez vous ennuyez, vous ne semblez pas sortir souvent de Lotus Pier."

Le sourire de l'alpha s'élargit légèrement quand il constate que son présent semble plaire à son interlocutrice. S'il compte se servir de tous ceux qui peuvent aider ses projets à se réalise, cela ne l'empêche pas de ressentir de l'affection pour les personnes innocentes qui agissent avec bienveillance. Parfois, il envie cette bienveillance, lui qui peut agir avec cruauté sans pour autant ressentir de poids peser sur sa conscience.

"Ahahah... Le voyage a été long... je ne dirais pas non à l'idée de manger un petit quelque chose... Mais, je peux vous aider ! Je n'aimerais pas abuser de votre gentillesse ou me faire taper sur les doigts par Jiang Zongzhu."

Il passe une main dans sa longue chevelure d'ébène et se gratte la tête dans un geste d'embarra tandis qu'une expression d'imbécile-heureux vient se dessiner sur son visage.

"Au fait, il y a eu des changements à YunmengJiang ces derniers temps ? Vous avez dit que votre frère est parti chasser... est-ce que... est-ce que cela signifie qu'il y a beaucoup de cadavres féroces dans les environs ?"

Huaisang est surpris par la réponse de la jeune femme qui semble satisfaite de sa vie malgré toutes les horreurs qu'elle a pu vivre et les cicatrices qu'elles ont pu lui laisser. Il note cependant une tournure de phrase qui laisse place au doute. "Il se plait là-bas", pas un "on", mais un "il" comme si elle ne s'y sentait pas réellement bien même si elle précise que c'est l'une de ses deux maisons.

"A votre place, je ne sais pas si j'aurais eu le courage d'y retourner" dit-il en cachant ses lèvres et son nez derrière son éventail. Pas de question, un simple commentaire. Il ne veut pas forcer son interlocutrice à parler de choses douloureuses si elle n'en a pas envie. "Jin Gongzi a bien grandi. J'ai l'impression que hier encore il était enfant et pourtant le voilà qui manie le sabre et qui va chasser..." lâche-t-il dans un soupir, éventant légèrement son visage.

Il observe la vue qui s'offre à lui puis ferme les yeux quelques instants pour se concentrer sur son odorat. Il y a ici quelque chose de reposant et nostalgique. L'alpha peut se remémorer de la douce époque où il jouait innocemment avec les frères du clan Jiang. C'est apaisant. Lorsqu'il se rend à Lanling Jin, il ne peut s'empêcher de penser aux méfaits de Jin Guangyao et de sa vengeance. Lorsqu'il se trouve à Qinghe Nie, son coeur est avec son défunt frère qui malgré les années qui se sont écoulées n'a pu trouver le repos.

"Si vous le souhaitez, je serais ravi de partager avec vous quelques peintures de ma collection si vous n'avez pas encore fini la décoration. Vous devez vous en souvenir mais je suis un grand amateur d'art !"

A-xian... Le Nie se demande si la mention de son vieil ami implique que la jeune femme est toujours prisonnière du passé ou si elle a pu le croiser depuis qu'il est revenu d'entre les morts.

"Ah... hum... bien sûr... je comprends.. pas de peintures" répond-t-il l'air un peu embarrassé. Comédie ou réalité ? Lui-même l'ignore. A une époque, il aurait véritablement été gêné à l'idée d'aborder ainsi un sujet qui fâche. Mais maintenant ? Après tous ces mensonges et manigances, peut-il réellement être embarrassé par quelque chose d'aussi...  difficile à anticiper, pour ne pas dire trivial.

Le cultivateur à l'éventail écarquille les yeux. Il ne s'attendait pas à ce que la nouvelle aille si vite bien que ce n'est pas pour lui déplaire.

"A... A-xian ? Est-ce que... on pense à la même personne ? Wei Wuxian ? Mais... son âme n'avait-elle pas disparue sans laisser de trace ?" Il marque une pause, puis ferme son éventail brusquement commençant à le secouer dans tous les sens avant de reprendre la parole : "Ne vous trompez pas ! Je.. je suis très content que mon ami soit encore en vie ! Mais vous êtes sûre ? Vous l'avez vu ?"

Par mesure de sécurité, il préfère éviter de parler de Mo Xuanyu et concentrer son attention sur le Patriarche Yiling, ce qui ne devrait pas être surprenant.

"Ah ! Mais... mais s'il est... démoniaque... et que... il fait le mal... Qinghe Nie ne pourra pas... rester sans rien faire..."

En tant que chef de clan, Huaisang ne peut malencontreusement pas se montrer aussi "protecteur" envers Wei Wuxian et assurer qu'il l'assistera après tout, le Patriarche Yiling est haïs de tous et considéré comme le mal incarné. Qui sait ? Peut-être même que Jiang Wanyin le recherche pour lui faire payer ses méfaits -même si le Nie sait qu'il est en réalité une victime, au même titre que Mingjue-.

Malgré le fait qu'elle prétende aller bien, Jiang Yanli ne peut totalement cacher la douleur qui l'habite. Le chef du clan Nie ressent comme un pincement au coeur. Cette souffrance qu'elle ressent est sans nulle doute liée aux agissements de Jin Guangyao et donne une raison de plus à l'homme de mener sa vengeance. Mais en même temps, il se sent désolé de devoir utiliser l'un des précieux frères de la jeune femme pour ses plans.

"Je préférerais abandonner mon rôle de chef de clan à abandonner l'art" dit-il l'air fier bien qu'il ne pense pas pouvoir un jour abandonner ses responsabilités de chef de clan, par respect envers son défunt frère. "La prochaine fois que je viendrai, j'apporterai des peintures, dans ce cas ! A moins que vous préfériez que l'on peigne ensemble..." Huaisang sait qu'il ne peut pas effacer les cicatrices de la femme ou refermer les blessures de son âme mais il peut essayer de lui faire oublier, pour l'espace de quelques heures, sa douleur.

Le vil manipulateur hoche la tête lorsque la mère lui parle de ce qu'elle a entendu dire. Même si elle prétend ne pas en savoir beaucoup, chaque information qu'elle livre est très importante à ses yeux.

"Jiang Wanyin doit avoir besoin de temps. En tous cas, si Hanguang Jun est avec lui, Wei Wuxian ne risque rien."

Le cultivateur à l'éventail grimace lorsque son interlocutrice commence à se mettre en colère. Il a plutôt mal joué, pour le coup. Lui qui voulait jouer la sécurité et le cultivateur intègre en essayant de ne pas trop protéger Wei Wuxian, le voilà qu'il blesse une nouvelle fois Jiang Yanli. A vrai dire, il n'a jamais été véritablement à l'aise avec les femmes dont le fonctionnement de l'esprit lui demeure un mystère total. Il se met à secouer la tête.

"Aaaaah ! Ce n'est pas ce que je voulais dire ! Vous me connaissez, je ne ferais pas de mal à une mouche !" Vil mensonge, Nie Cang est prêt à faire des choses terribles pour le bien de sa vengeance. Il a même étudié l'art du poison et déterré le cadavre d'une innocente pour châtier son ennemi. "C'est juste que... vous savez ce que pensent les autres... Je... Je ne peux pas m'opposer à eux... Je... je ne suis pas...co... comme Jiang Zongzhu..." L'homme baisse la tête affichant une expression de profonde tristesse. "Je ne lui serais même pas utile..."

Huaisang ne ferait pas de mal à Wei Wuxian -ou du moins, il ne l'enverrait pas jusqu'à sa perte- et répandre de viles rumeurs à son égard, encore moins. Jin Guangyao est son ennemi. Wei Wuxian est au contraire un ami, un qu'il admire véritablement et en qui il a confiance. S'il pouvait sauver la réputation de son ami au cours de son plan, en le faisant passer pour le héros qui a découvert les manigances de Jin Guangyao, alors il en serait plus qu'heureux.

"Est-ce que... Jin Rulan est... au courant ?" Le chef de clan marque une courte pause, prenant soin de peser ses mots. Il cache son visage derrière son éventail comme pour se protéger. "Qu'est-ce qu'il... pense de... son oncle Wei ?" Si Jiang Yanli connait Wei Wuxian et lui fait confiance, ayant grandi avec lui, son fils aurait des raisons de le haïr étant donné toutes les rumeurs qui circulent sur lui et les catastrophes qu'on lui a rattaché. A vrai dire, il se moque pas mal de l'avis du jeune homme, mais il considère qu'il s'agit là d'une bonne façon de repartir sur de meilleures bases.

Nie Cang est ravi de constater que Jiang Yanli est sensible à sa proposition. Il ne s'attendait pas à ce qu'elle aille jusqu'à envisager de faire un voyage jusqu'à l'Unclean Realm mais il n'en est que plus content. Ce n'est pas tout le monde qui apprécie la beauté de l'art, surtout dans le monde de la cultivation -ce qui est encore plus vrai dans un clan comme le sien qui met la puissance et la droiture avant tout- et il n'a pas vraiment l'habitude de recevoir au domaine de son clan pour autre chose que des affaires qui donnent mal à la tête.

"Je serais enchanté de vous accueillir à Qinghe même si je crains que le cadre ne soit pas aussi agréable que Yunmeng. Jin Rulan est également le bienvenu !" L'alpha marque une pause, complètement sur le cul. Il ne s'attendait pas à ce que la jeune femme lance une information aussi surprenante comme si de rien était. Bien sûr, il était au courant mais avait-il envie qu'on le sache ? "Par contre... A-xuan... je le... connais ? Ne me dites pas que comme Wei Wuxian..."

Huaisang n'est pas Jiang Wanyin mais il peut déjà imaginer mille et une raisons pour lesquelles ce dernier pouvait être énervé et stressé. L'alpha a lui-même eu beaucoup de mal à prendre la position de chef de clan alors même que les conditions dans lesquels cela s'est fait étaient moins périlleuses que pour le cultivateur au fouet. Alors, il n'imagine même pas les difficultés qu'li aurait pu rencontrer s'il avait été un béta tout ce qu'il y a de plus normal ou pire, un oméga. Il avait eu Jin Guangyao et Lan Xichen pour l'aider là ou Jiang Wanyin avait tout fait tout seul avant d'assister à la déchéance de son frère adoptif.

"Jiang Zongzhu est fort même s'il est également peut-être un peu trop fier pour son bien. Je suis sûr que si on lui laisse un peu de temps et d'espace pour réfléchir, tout s'arrangera naturellement" dit-il en souriant, souhaitant rassurer la jeune femme. Il sait que son ami est têtu, surement l'une des personnes les plus fières et têtues qu'il lui ait été donné de rencontrer alors, cela peut prendre du temps, beaucoup de temps.

Le cultivateur à l'éventail est surpris d'entendre la mère de famille l'encourager à poursuivre dans l'art. Cependant, il ne peut qu'apprécier la vision optimiste que la femme a de la vie. Relevant la tête, il adresse un sourire à son hôte avant de s'emparer, à son tour, de ses baguettes et de commencer à goûter aux plats qui leur ont été apporté.

"Votre fils est encore jeune et il est facile de se laisser influencer par les rumeurs, à cet âge là. Peut-être que si vous ou votre mari venait à lui parler... même moi, je pourrais essayer ? Il est parfois plus facile de se confier à un inconnu qu'à un proche." Il marque une pause. Si tout se passe comme Huaisang l'a prévu, Jin Ling sera probablement déçu voire même dévasté alors le moins qu'il puisse faire est d'essayer de lui apporter quelque chose en échange de ce qu'il s'apprête à lui retirer. Un oncle pour un oncle. "Je ne suis pas un total étranger mais je ne suis pas non plus de la famille... alors voilà... mais ce n'est qu'une idée en l'air !"

Le chef du clan Nie n'est pas totalement convaincu par l'argument de la mère de famille, en songeant au manque d'intérêt qu'ont certains humains pour la nature et l'art -notamment son propre frère-. Et puis, il songe qu'à l'époque de la fondation des sectes -et aujourd'hui aussi-, les chefs de clan ont d'autres préoccupations comme la protection de leurs disciples et des techniques de leur clan par exemple. Cependant, il ne contredit pas son interlocutrice, il se contente de hocher la tête en silence, lui accordant un sourire timide.  

Huaisang est surpris que Yanli se montre aussi franche, surtout concernant l'accusation du chef de clan Jin. Il ne parvient même pas à imaginer les conséquences que pourrait avoir une accusation publique avec pour appui le retour de Jin Zixuan. Cela serait surement un coup très dur pour Jin Guangyao même si son intelligence et sa ruse naturelles lui permettraient peut-être de trouver un moyen d'échapper à la justice en rejetant la faute sur quelqu'un d'autre ou en criant à la conspiration. C'est en partie la raison pour laquelle l'alpha aimerait attendre. Il veut être sûr de ne laisser aucun échappatoire au criminel -et au passage il souhaiterait évidemment récupérer le cadavre de son frère-.

"San-ge ? P-p-pour-pourquoi ? Vous... vous êtes sûre ?" Il marque une pause pour secouer la tête dans un geste de panique, faisant honneur à son titre d'Agitateur de tête. C'est que le "bon à rien" ne pourrait pas rester de marbre en entendant pareils accusations sur l'un des hommes qui l'a assisté durant des années. "Euh... en tous cas... je... je suis très heureux que votre mari vous soit retourné. J'espère qu'il se porte bien... et que... que le futur vous épargnera d'autres... soucis."

Il cache une nouvelle fois son visage derrière son éventail, après avoir déposé ses baguettes, et décide de lâcher quelques mots supplémentaires au sujet du "mystérieux héros" :  "Peut-être que si l'inconnu ne s'est pas dévoilé... c'est parce qu'il ne veut pas de... de remerciements... qu'il ne juge pas les mériter..."

A vrai dire, Nie Cang ne peut cacher sa surprise quand son interlocutrice mentionne les prétendantes de son frère. C'est qu'avec la personnalité du bonhomme, il ne s'attendait pas à ce qu'il soit populaire. Décidément, il ne comprend vraiment pas le fonctionnement de la gent féminine. Enfin, il est tout de même heureux d'apprendre que tout n'est pas perdu pour son ami. Mais, cette histoire lui rappelle qu'il devrait également songer à l'avenir de son clan.

"De toute façon, nous sommes tous encore jeunes..." Il se penche en direction de la jeune femme et lui murmure : "Avec le retour de votre mari... avez-vous pensé à offrir un frère ou une soeur à votre fils ?  Je me souviens encore de sa naissance. Cela a fait beaucoup de bruits. Tout le monde était si joyeux malgré la violence encore présente."

Beaucoup seraient outrés par ce genre de propos mais le cultivateur à l'éventail n'était pas connu par son sens du tact et puis, il faisait parti de ceux qui faisaient entrer des oeuvres pornographiques à Cloud Recesses. En conclusion, ce ne sont pas vraiment des propos surprenants venant de lui bien qu'ils n'en restent pas plus adaptés à la situation. Mais, c'est sa façon de souhaiter le bonheur de la petite famille et de détendre un peu l'atmosphère.

L'alpha prend quelques bouchées de plus, écoutant les mots de son interlocutrice avec autant d'attention que possible. Lorsqu'il relève la tête et qu'il voit la détresse dans le visage de la douce Yanli, il ressent comme un pincement au coeur. Il pose une nouvelle fois ses baguettes et lâche un soupir avant d'adresser un sourire qu'il espère réconfortant à la jeune femme.

"Je lui parlerai. Je ne sais pas si mon aide sera très utile, mais vous et votre famille pouvez vous reposer sur moi si vous en avez besoin." Il détourne le regard et se gratte la joue de son index. "Vous avez le droit de pleurer, vous savez ? Quand mon frère est mort... je crois que j'ai vidé toutes les larmes de mon corps... Cela m'a fait beaucoup de bien... Vous devriez essayer."

Huaisang n'en croit pas ses oreilles. Il se mord les lèvres afin de ne pas rire, toujours caché derrière son éventail. Il ne comprend pas comment elle peut songer à pardonner l'homme qui a séquestré son mari pendant plus d'une dizaine d'années sans lui demander la moindre justification -et encore, même avec une bonne justification, il ne l'aurait pas pardonné-. Il a aider à élevé Jin Ling et alors ? Il l'a privé de son père et surement de l'un de ses oncles -bien qu'elle ne soit pas au courant pour l'instant de tout ce qu'il a pu faire-. Décidément, elle est bien trop gentille. A moins que ce soit l'homme qui soit particulièrement rancunier et cruel.

"Mais... Si c'est... vrai... Euh... Est-ce que... vous ne voudriez pas... rendre justice à votre mari ? Et... à votre fils qui a été privé d'un père ?" Il baisse son éventail, dévoilant son visage grimaçant. L'alpha veut tester la mère de famille, il aimerait savoir si elle est si gentille que cela, si elle est vraiment prête à pardonner quelqu'un qui l'a privée d'un bonheur qu'elle méritait. "J'ai du mal à croire que San-ge ait pu faire ça. Il-il m'a beaucoup soutenu... Mais... votre mari n'est pas du genre à accuser quelqu'un sans preuve... C'est... déstabilisant... si c'est bien vrai alors il a fait quelque chose... d'horrible."

Nie Cang penche la tête en souriant lorsque la jeune femme évoque son espérance quant au fait qu'il puisse trouver sa moitié et entretenir un puissant lien avec elle. Il ne recherche pas vraiment sa moitié, il a d'autres préoccupations qu'il juge plus importantes que l'amour. Le cultivateur a l'éventail ne se bat pas pour la justice ou la paix dans le monde. Il n'est pas aussi tolérant que Jiang Yanli ni aussi bon que Wei Wuxian. Il se bat pour son clan et sa famille par pur égoïsme et cela lui convient.

Le mal aise se lit sur le visage de la femme lorsque l'homme aborde un sujet plutôt intime. A vrai dire, cela amuse grandement le vil manipulateur bien qu'il garde sa contenance. Sans grande surpris, son interlocutrice lui répond même si elle se montre plus loquace que ce qu'il aurait pu imaginer.

"Hum... Je vois. Evidemment ! Ne mettons pas la charrue avant les boeufs !"

Il aurait certainement pu pousser la plaisanterie un peu plus loin, mais il ne voulait pas non plus que son hôte le mette dehors ou décide de le fuir. Et puis, cette invention lui est surement suffisante pour entretenir sa réputation de bon à rien agitateur de tête.

Les remerciements de la survivante le touchent. Etre précieux pour la famille ? Huaisang n'en est pas si sûr, même s'il tient beaucoup à celle-ci. Une ombre de tristesse traverse son visage. "Je les ai moi-aussi toujours apprécié... Et je ne pourrai jamais oublier ces moments que nous avons partagés. Si seulement nous pouvions retourner en arrière..." Parfois, il se dit que tout serait bien mieux s'il n'avait jamais découvert la vérité derrière la mort de son frère et les méfaits de Jin Guangyao. Parfois, il aimerait retourner à cette époque où aucune responsabilité ne pesait sur ses épaules et où il pouvait librement s'amuser avec ses amis.

"Si vous n'allez pas bien et que vous refusez d'extérioriser tout cela d'une façon ou d'une autre, je crains que cela ne fasse qu'inquiéter davantage tout le monde..." Il marque une courte pause, cherchant les mots adéquats pour convaincre son interlocutrice d'exprimer sa peine. "Vous souhaitez autant leur bonheur qu'ils souhaitent le votre. Votre frère et votre fils prennent les choses très à coeur, ils pourraient penser que c'est votre faute." Il marque une nouvelle pause, cherchant une solution plus à même de satisfaire la jeune femme. "Si vous ne souhaitez pas verser de larmes, vous pouvez toujours essayer d'extérioriser tout cela par l'exercice physique ou les activités artistiques."

Huaisang n'y croit vraiment pas ses oreilles. La jeune femme lui confirme plus ou moins qu'elle est bel et bien prête à pardonner le criminel bien qu'elle soit en colère contre lui parce qu'il s'est bien occupé de son fils même si elle explique qu'elle souhaite qu'il soit puni. Si elle le pardonne mais souhaite qu'il soit puni, cela implique qu'elle a pour l'instant nulle intention de révéler ses méfaits, ce qui arrange le Nie. Il hoche la tête lorsqu'elle s'excuse en disant qu'il doit être choqué par cette révélation, inconsciente qu'il joue un rôle dans tous ces derniers événements que l'on pourrait qualifier de perturbants.

"Je... Je ne sais pas... Je ne sais pas trop quoi faire de cette information.." Sa voix se veut tremblante. Il ne peut pas dire qu'il va faire comme s'il n'avait rien entendu, par respect pour les victimes de Jin Guangyao, mais il ne peut pas non plus promettre qu'il irait parler à son San-ge comme il a promis qu'il irait parler à Jin Ling.

Il n'est pas étonnant que la Jiang veuille retourner dans le passé, avant que tout ne s'effondre. Nie Cang a aussi cette envie comme il a pu le mentionner. Une triste envie puisqu'il ne s'agit là que d'un fantasme qui ne se réalisera jamais.

"Hélas, c'est impossible" conclut-il. Il reprend, après une courte pause : "Mais, il est peut-être possible de faire en sorte que les erreurs du passé ne se répètent pas..." L'alpha ne fera plus aveuglement confiance à qui que ce soit. Il ne permettra pas qu'on le manipule ni que l'on ne le pousse à faire du mal à ceux qu'il aime.

Bien que le visage de Yanli soit rayonnant, le cultivateur à l'éventail parvient à voir au moins une dizaine de raisons pour lesquelles la jeune femme se sentirait mal et ce, même si elle a effectivement des raisons de se réjouir. Il trouve que c'est une femme intelligente et sensible. Et, il sait que ce genre de personne ne peut tout simplement pas ignorer dans quelle situation instable et même périlleuse, elle se trouve. Jiang Wanyin a d'autres préoccupations ? Jin Ling est trop jeune ? L'homme fronce légèrement les sourcils. Il n'est pas d'accord avec ces excuses mais il n'est pas là pour chercher le conflit alors il décide de ne pas réagir à ces tristes mots.

La Jiang est habile. Elle parvient à ramener le sujet à Huaisang en une fraction de seconde. Il hoche la tête.

"Mon frère doit actuellement me maudire, où qu'il soit. Pour lui, je me suis toujours montré faible..." Il lâche un soupir, empli de tristesse. "Il avait raison, j'ai toujours été faible. Mais pleurer ou dessiner n'est pas quelque chose que ferais un faible, je pense..." Il ne sait pas vraiment comment expliquer ce qu'il pense. C'et difficile, parfois les mots manquent, parfois ils sont inexactes dans la retranscription de ressentis. Et, c'est justement un ressentis qu'il cherche à exprimr. "Je pense qu'il faut être courageux pour pouvoir se montrer aussi sincère."

A vrai dire, c'est encore plus complexe que cela, car le Nie pense que ce mécanisme n'existe pas chez tout le monde, uniquement chez les plus sensibles. Et, il ne sait pas encore si les plus sensibles sont faibles ou forts.

"Euh... Cela ne veut pas dire que je me trouve courageux ! Je suis faible et lâche ! Mais je n'ai pas honte de pleurer ou de peindre pour chasser ma tristesse. J'y trouve de la noblesse. Et ce qui est beau avec l'art c'est que toutes les émotions peuvent être exprimées et que chaque oeuvre est unique puisque chaque oeuvre contient une sensibilité différente qui n'existe qu'un temps limité. Les véritables reproductions n'existent donc  pas puisqu'elles ne peuvent reproduire une émotion complexe qui n'existe déjà plus."

Le cultivateur se stoppe un instant et se tire les joues. Il s'est un peu laissé aller. Ce n'est pas mauvais, en soit, mais il craint qu'il ait pu ennuyer son interlocutrice. Il ne saurait même pas dire qu'elle était le sujet de base.

"Désolé. Je me suis un peu emporté. Cela ne doit pas vous intéresser."

La femme soupire et explique comment selon elle, on pourrait protéger le futur en évitant de commettre les mêmes erreurs. Huaisang est plutôt d'accord avec cela et il hoche la tête d'approbation. Il doute que les trois anciens disciples de la secte Yunmeng Jiang puissent refaire les mêmes erreurs et il ne se permettrait lui-même pas de retomber dans un piège semblable.

"Je suis sûr que tous vos soucis vont bientôt disparaître." Il marque une pause, souriant. Il ne peut pas lui dire que Jin Guangyao va payer pour ses crimes et que la vérité va finalement émerger, mais il peut au moins essayer de la rassurer à un niveau plus personnel. "Vous connaissez vos frères, une fois qu'ils auront réglé leurs différents, ils seront aux petits soins avec vous et Jin Rulan" dit-il entre deux bouchées.

Le Nie aurait bien aimé ajouter que Wei Wuxian est débrouillard et qu'elle n'a donc pas besoin de s'en faire pour lui, mais l'expérience a prouvé que même l'homme le plus débrouillard du monde ne peut échapper à une conspiration brillamment exécutée.

Le cultivateur à l'éventail écarquille les yeux quand son interlocutrice lui dit que son frère ne l'a certainement jamais considéré comme étant faible. "Je crois que je ne saurai malheureusement jamais ce qu'il pensait vraiment de moi." Ce n'est peut-être pas impossible si son frère venait à devenir comme Wen Ning un cadavre féroce doté de conscience, mais le chef de clan doute que tout puisse si bien se passer.

Les mots de Yanli ne sont pas sans toucher le coeur de l'alpha. Mais, s'il est plutôt heureux d'entendre cela, il ressent également de la culpabilité. La culpabilité d'utiliser les proches de son interlocutrice pour la réalisation de ses plans, ainsi que la culpabilité de lui mentir. Des larmes se forment au coin de ses yeux malgré sa tentative de ne rien montrer, il décide donc de suivre ce flot. Il renifle alors que ses larmes s'écoulent comme un fleuve vient se jeter dans la mer. Il pleure comme un enfant, sans se cacher.

Le chef du clan Nie sait pertinemment en quoi il peut être difficile pour les deux hommes de se réconcilier. Ils ont chacun des raisons qui pourraient les empêcher de vivre ensembles en harmonie auxquelles s'ajoute leur forte personnalité -enfin surtout celle du chef du clan Jiang-. Mais, il croit tout de même qu'ils seraient capable d'oublier leurs différents et de travailler de nouveau main dans la main si on leur donnait un petit coup de main. Ils ont grandi ensembles, ce n'est pas quelque chose de si facile à oublier.

"Il faudrait peut-être leur apporter un coup de main ?"

L'esprit fourbe de Huaisang lui permet d'imaginer plusieurs scénarios susceptibles de rapprocher les deux hommes, dont certains plus ou moins dangereux. Depuis la mort de son frère, le brun a quelque peu pris goût au danger. Une tendance autodestructrice ? Une volonté de se punir ? Peut-être bien. Il ne veut pas mourir mais il ne veut pas oublier. Le poids de sa culpabilité et de ses échecs ne faisant qu'augmenter au fil du temps.

"J'ai toujours fait ma tête de mule et je ne l'ai pas écouté. Je lui ai causé... beaucoup de problèmes... J'ai même tenu des mots... dur et cruels envers lui sous le joug de la colère... Peut être même que j'ai accéléré sa fin avec mon comportement." Un soupir s'échappe des lèvres du cultivateur à l'éventail. "J'ai été stupide... et je me trouve toujours un peu bête parfois... ahahah... je dois souvent demander de l'aide à d'autres..."

L'homme essaie d'essuyer ses larmes du revers de sa manche, mais aussi tôt qu'il sèche des larmes, d'autres se mettent à couler. Lorsque Yanli lui demande si elle l'a blessé, il secoue la tête.

"Vous êtes gentille... trop gentille."

L'alpha n'est pas habitué à ce que l'on mâche ses mots en sa présence. Il a l'habitude d'être traité comme un bon à rien complètement stupide et cela lui convient. Il lui est plus difficile d'accepter des compliments qu'il reçoit avec une certaine culpabilité. En tous cas, pleurer lui fait du bien.

-Vous pensez réellement que ça serait possible ? À Cheng est toujours si en colère pour tout ce qui s’est passé, est-ce que ça serait un jour imaginable de retrouver une quiétude entre les deux.

L'expression du Nie change subitement. Son visage exprime de la confiance voire de la fierté tandis que son sourire se veut un brin sournois. La créativité de l'homme, directement liée à son goût pour l'art, ne connait aucune limite. Et, à ses yeux, il n'y a rien de plus simple que réconcilier deux personnes -quand il n'en fait pas partie-.

"Je suis sûr que si on leur donne un petit coup de pouce, ils pourront redevenir aussi proches qu'avant voire même plus." Il marque une courte pause se penchant vers Yanli pour murmurer quelques mots à son oreilles, cachant ses lèvres des yeux curieux à l'aide de son éventail. "Il suffit d'un plan bien élaboré... une petite frayeur, une petite collaboration imprévue et inévitable, des lèvres qui se délient... et voilà que la famille se réunit de nouveau."

L'expression de l'alpha est beaucoup plus fermée lorsqu'il parle de son frère. C'est toujours un sujet sensible. Toute cette colère, toute cette tristesse et tous ces regrets, comment les évacuer ? Il n'y parvient pas. Tout ce qu'il peut espérer c'est que la vengeance lui fera passer à autre chose. Les mots de la beta ne sont pas d'un grand réconfort. Il sait qu'il n'est pas directement responsable, mais il aurait dû remarquer que quelque chose clochait. Il aurait peut-être pu empêcher tout cela s'il avait été plus à l'écoute.

"Si ce n'est pas moi... alors quelle est la cause de sa chute... de sa déchéance ?"

Il n'est pas prêt à révéler ce qu'il sait à son interlocutrice. Il ne peut que la faire réfléchir, la mettre sur la piste et continuer à mentir, à se cacher derrière un masque même s'il a l'impression que ce dernier lui arrache peu à peu son coeur, le transformant petit à petit en monstre.

Lorsque la jeune femme se met à tousser, Huaisang se lève dans la précipitation pour s'emparer d'une tasse et servir de l'eau à la pauvre mère affaiblie.

"Je suis désolé. Je vous importune. Buvez un peu, cela devrait vous faire du bien. Vous avez besoin que j'aille vous chercher quelque chose ? Que j'appelle un serviteur ?"